domingo, 8 de abril de 2018

Poemas 1. "Las flores del mal" (1857) de Charles Baudelaire


La metamorfosis del vampiro (1852)


La mujer, entre tanto, retorciéndose
Igual que una serpiente en las brasas,
Y amasándose los pechos por encima de las ballenas del corsé
Dejaba deslizar de su boca de fresa estas palabras impregnadas de almizcle:
-”Tengo los labios húmedos y conozco la ciencia
de perder en una cama la antigua conciencia.
Seco todas las lágrimas en mis pechos triunfantes
Y hago que los viejos se rían con risas infantiles.
¡Para quien me ve desnuda y sin velos, sustituyo
a la luna, al sol, al cielo y a las estrellas!
Cuando aprisiono a un hombre en mis temidos brazos,
O cuando abandono mi busto a los mordiscos,
Tímida y libertina, frágil y robusta,
Soy, mi querido sabio, tan experta en deleites
Que sobre ese colchón que se desmaya de emoción,
¡los ángeles importantes se condenarían por mí!”

Cuando me hubo chupado toda la médula de los huesos,
Y me volví hacia ella con languidez
Para darle un beso de amor, ¡no vi más
Que un odre de flancos viscosos, rebosante de pus!
En mi helado terror, cerré los ojos,
Y cuando volví a abrirlos a la viva claridad,
A mi lado, en lugar del fuerte maniquí
Que parecía haber hecho provisión de sangre
Entrechocaban en confusión unos restos de esqueleto,
Que producían un grito como el de una veleta
O el de un cartel que, en la punta de una vara de hierro,
El viento balancea en las noches de invierno.



Les Métamorphoses du vampire
La femme cependant, de sa bouche de fraise,
En se tordant ainsi qu'un serpent sur la braise,
Et pétrissant ses seins sur le fer de son busc,
Laissait couler ces mots tout imprégnés de musc:
— «Moi, j'ai la lèvre humide, et je sais la science
De perdre au fond d'un lit l'antique conscience.
Je sèche tous les pleurs sur mes seins triomphants,
Et fais rire les vieux du rire des enfants.
Je remplace, pour qui me voit nue et sans voiles,
La lune, le soleil, le ciel et les étoiles!
Je suis, mon cher savant, si docte aux voluptés,
Lorsque j'étouffe un homme en mes bras redoutés,
Ou lorsque j'abandonne aux morsures mon buste,
Timide et libertine, et fragile et robuste,
Que sur ces matelas qui se pâment d'émoi,
Les anges impuissants se damneraient pour moi!»

Quand elle eut de mes os sucé toute la moelle,
Et que languissamment je me tournai vers elle
Pour lui rendre un baiser d'amour, je ne vis plus
Qu'une outre aux flancs gluants, toute pleine de pus!
Je fermai les deux yeux, dans ma froide épouvante,
Et quand je les rouvris à la clarté vivante,
À mes côtés, au lieu du mannequin puissant
Qui semblait avoir fait provision de sang,
Tremblaient confusément des débris de squelette,
Qui d'eux-mêmes rendaient le cri d'une girouette
Ou d'une enseigne, au bout d'une tringle de fer,
Que balance le vent pendant les nuits d'hiver.

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